Free the nipple : les tétons seront-ils bientôt libérés sur les réseaux sociaux ?
En janvier dernier, cette déclaration de l'ancienne Première ministre du Danemark – Helle Thorning-Schimdt –, n'est pas passée inaperçue : « Il est intéressant de remarquer que les seuls mamelons non sexualisés sont ceux des hommes ou ceux qui ont subi une opération. Nous disons qu'il devrait y avoir plus d'égalité. Nous demandons à Meta de se pencher sur cette question. » Ces paroles ont un certain poids puisque Helle Thorning-Schimdt fait partie du conseil de surveillance de Meta, sorte de « cours suprême » éthique regroupant 20 membres internationaux triés sur le volet (avocat, journalistes, anciennes personnalités politiques, etc...). Et l'avis majoritaire du conseil de surveillance tend à voir dans la modération des firmes de Mark Zuckerberg (Facebook, et surtout Instagram) une vision trop binaire du genre, et trop conservatrice par rapport aux évolutions sociétales actuelles. Pour preuve, Instagram a retiré récemment les photos publiées par un couple montrant leurs poitrines (avec les mamelons couverts), ayant pour but de sensibiliser le public sur la santé des personnes transgenres, et de récolter des fonds afin de financer une opération de réassignation sexuelle (ablation des seins). Une censure qui a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux et poussé le conseil de surveillance de Meta a allumer un warning en soutenant le fait que « le retrait de ces images n'est pas conforme avec les valeurs de Meta ou ses responsabilités en termes de droits humains. » Et d'ajouter : « Le règlement de l'entreprise sur la nudité des adultes empêche plus fortement les femmes et les personnes transgenres et non binaires de s'exprimer sur ses plateformes. » Quelque chose serait-il en train de changer au royaume de Zuck ?

Ces évènements prolongent un mouvement féministe qui depuis maintenant plus de 10 ans est symbolisé par un hashtag évocateur : #freethenipple. Pour comprendre la source de ces revendications, il faut remonter en 2012 lorsque cette campagne a été lancée par la réalisatrice américaine Lina Esco, afin de promouvoir un documentaire la montrant les seins à l'air dans la ville de New-York. Cet hashtag avait alors été utilisé pour diffuser des extraits du docu sur les réseaux sociaux. N'allez pas voir dans cet acte une simple velléité d'exhibitionnisme : non, toute cette mise en scène avait pour but de montrer l'inégalité de traitement entre le corps féminin et masculin. Si ces vidéos ont été immédiatement effacées par Facebook, cette lutte émancipatrice a très vite été soutenue par des célébrités comme Miley Cyrus, Lena Dunham ou Rihanna, lui donnant une visibilité et démocratisant #freethenipple. Les années ont passé, le combat reste, et pourrait connaître une première victoire ces prochaines semaines si Meta assouplit sa politique de modération. Mais attention, il ne faut pas s'y tromper, #freethenipple ne doit pas être confondu avec un mouvement pro-pornographique. Car comme le souligne l'activiste Kylie Cheung sur le site Pajiba : « Malgré toute sa controverse, le mouvement Free the Nipple concerne avant tout les femmes de tous les jours. C'est un mouvement destiné à effacer les doubles standards sexuels qui font honte et objectivent le corps féminin ; son objectif est de restaurer l'autonomie des femmes dans une société qui cherche à sexualiser, stigmatiser et réglementer chacune de leurs décisions corporelles. » La balle est désormais dans le camp de Méta. La firme saurait-elle ne plus cacher ce sein qu'elle ne saurait voir ?
