De JUDY à BLACKKKLANSMAN, 5 films basés sur des histoires vraies qui dépotent
Juste avant le chaos engendré par la crise sanitaire, deux beaux biopics sur des personnalités féminines majeures du vingtième siècle sont sortis dans les salles de cinéma en 2020. C’est d’abord le cas de RADIOACTIVE (Marjane Satrapi), où l’autrice et dessinatrice de BD devenue réalisatrice filme l’actrice britannique Rosamund Pike dans la peau de la célébrissime scientifique Marie Curie. L’occasion pour la cinéaste franco-iranienne de revenir sur le parcours incroyable de celle qui reste la première femme à avoir gagné un prix Nobel, et la seule à en avoir récolté deux, qui plus est dans deux catégories différentes (physique en 1903 et chimie en 1911). Mais au-delà des prouesses scientifiques, Marjane Satrapi rend surtout hommage à la façon dont Marie Curie a réussi à s’imposer dans un milieu et une époque effroyablement misogynes. La réalisatrice de PERSEPOLIS (2007) en fait une héroïne féministe avant-gardiste, et ose quelques flashforwards qui rappellent l’utilisation néfaste faite des découvertes de Curie après sa mort, en particulier l’utilisation de la bombe atomique. Rosamund Pike est excellente dans le rôle, bien accompagnée par Sam Riley (Pierre Curie), et Anya Taylor-Joy (Irène Curie).
Autre film stoppé net dans son exploitation par le premier confinement, JUDY (Rupert Goold) a permis à Renée Zellweger de récolter sans contestation possible l’Oscar de la meilleure actrice. La comédienne – révélée dans les années 2000 par la trilogie de films BRIDGET JONES – réussit une transformation stupéfiante pour incarner la Judy Garland de la fin des années 1960, fracassée par une carrière commencée très jeune, et devenue une enfant star dès 1939 avec son rôle dans LE MAGICIEN D’OZ (Victor Fleming, 1939). Le film de Rupert Goold se concentre donc sur la dernière année très triste de la vie de Judy Garland, où elle doit s’exiler à Londres pour continuer de chanter, alors qu’elle est lâchée par sa voix – et plus généralement sa santé défaillante – et que ses enfants sont de l’autre côté de l’Atlantique. Comme dans RADIOACTIVE, le film est construit autour de flashbacks, qui reviennent notamment sur l’adolescence de ce personnage féminin broyé malheureusement comme beaucoup d’autres par Hollywood. Un biopic à la hauteur d’une légende de l’histoire du cinéma.

Maintenant que l’on a évoqué deux figures historiques parmi les plus célèbres du siècle dernier, il est temps de rendre hommage à un personnage de l’histoire américaine dont le nom ne dira rien à la plupart des gens : Ron Stallworth. Après tout, la vertu principale des films inspirés d’histoires vraies n’est-elle pas de nous faire découvrir des événements et des héros souvent injustement méconnus ? Ron Stallworth est de ceux-là, mais heureusement pour lui et pour nous, Spike Lee a eu la bonne idée d’adapter un livre qu’il a écrit, en réalisant BLACKKKLANSMAN : J'AI INFILTRÉ LE KU KLUX KLAN (2018). Ce film d’époque se déroule dans les années 1970 et raconte l’histoire incroyable du premier policier noir de la police de Colorado Springs, ville du sud des Etats-Unis où le Ku Klux Klan est très bien implanté à l’époque. Stallworth a l’idée assez dingue d’infiltrer le groupe terroriste pour empêcher des actions violentes. Mais forcément, il a besoin d’être accompagné dans sa mission par un blanc – joué par Adam Driver dans le film – qui le remplace lors des rendez-vous avec les suprémacistes blancs du KKK. Grand prix du Festival de Cannes en 2018, BLACKKKLANSMAN marque le retour en grande forme de Spike Lee, dans un long-métrage politique qui mélange sérieux et humour, pour mieux s’attaquer à l’Amérique de Donald Trump. John David Washington est la révélation du film dans le rôle principal, et il est impossible de bouder son plaisir devant ce qui est aussi un hommage vibrant à la culture noire de l’époque.
Toujours dans les années 1970, BORG MCENROE (Janus Metz Pedersen, 2017) s’intéresse lui à la rivalité mythique entre les deux stars du tennis de l’époque : le Suédois Björn Borg, réputé pour son calme olympien, et le volcanique Américain John McEnroe, dont les colères ont forgé la légende. Que vous soyez fan de tennis ou pas, ce biopic qui se concentre sur la célèbre finale de Wimbledon 1980 offre d’excellents moments en ne ratant pas sa reconstitution des matchs de l'époque, ce qui était loin d’être gagné d’avance. Sverrir Gudnason et Shia LaBeouf réussissent aussi la performance d’être convaincants dans la peau de ces deux rock stars du sport, et le deuxième est réellement attachant dans son face à face avec des médias et une époque qui supportent mal les excès de son personnage.
Enfin, si la poésie est davantage votre tasse de thé que le sport, il vaut peut-être mieux vous tourner vers RIMBAUD VERLAINE (Agnieszka Holland, 1995), qui s’attaque à la relation pour le moins compliquée entre les deux poètes qui font notre fierté depuis le 19ème siècle. Plutôt sérieux historiquement car basé sur des lettres et des poèmes retrouvés, RIMBAUD VERLAINE permet de plonger dans la période où les deux artistes sont au sommet de leur art. Un film très sous-estimé d’une cinéaste qui a brillé depuis en réalisant notamment des épisodes de certaines grandes séries comme THE WIRE (David Simon, 2002). Et n’oublions pas non plus que RIMBAUD VERLAINE compte dans son casting un très jeune Leonardo DiCaprio, aux côtés de David Thewlis et de deux actrices françaises : Romane Bohringer et Dominique Blanc. Un bon film à voir à l’occasion du débat actuel sur la proposition très controversée de panthéonisation éventuelle de ce couple.
